Bonjour Daniel,
Après 18 ans passés au Japon, en Corée, au Vietnam et en Chine, ma famille envisage de revenir vivre en Europe. Ce retour est l'occasion de retrouver mes connaissances et amis du Sud de la France, et tu faisais évidemment partie de ceux que je souhaitais revoir. Les mots de reconnaissance que j’aurais pu t’exprimer, il me tient à cœur de leur donner forme ici et maintenant.
Fraîchement débarquée de son année de maîtrise au Mexique en des terres catalanes jusqu’alors inconnues, la petite bretonne que je suis a eu la chance de retenir ton attention en DEA et de partager, le temps de son Doctorat, la passion de la Recherche de l’équipe du CRILAUP. Tes préoccupations théoriques ont évidemment – jusqu’à aujourd’hui- nourri les miennes. Ainsi, les réflexions que tu cultivais sur les liens entre le Théâtre et l’Histoire, mais aussi les théories de la représentation – l’inévitable sémiotique de Charles S. Pierce!- continuent à nourrir mon approche des cultures. Grâce à toi, j’ai également pu intégrer la famille des Mexicanistes, et avoir jusqu’à aujourd’hui en Felipe Galván un ami. Grâce à toi, j’ai découvert le monde du Théâtre, et je continue à défendre ton combat : le Théâtre n’est pas de la Littérature. Et il ne se passe pas un jour où ne résonne en moi cette phrase, que tu avais prononcée avec tant de gravité, et dont je sentais bien que le sens, à l’époque, m’échappait : la principale tâche de l’homme est de mettre du sens dans le chaos qui l’entoure.
Je veux te remercier pour m’avoir accueillie, portée et pour m’avoir donné ta confiance. Je te suis reconnaissante pour avoir respecté mes choix et mes priorités, et m’avoir laissé partir et rédiger ma thèse au Japon. Je te suis reconnaissante pour m’avoir insufflé l’exigence intellectuelle qui était la tienne et avoir semé des graines qui continuent à s’épanouir dans mon champ théorique.
L’absence physique n’a jamais signifié pour moi un vide. Il est possible de l'envisager comme une autre modalité d’être. J'aimerais que tes proches puissent trouver quelque réconfort à cette idée. Et je souhaite que nous puissions poursuivre un dialogue, qui, en dépit du silence et de la distance, n’a, de mon côté, jamais été rompu.
Celle que tu appelais ton Hermès,
Sandrine Guyomarch Le Roux.